freeponLe 28 octobre 2016 se déroulera La Journée Internationale de la Langue et de la Culture Créole. Pour célébrer cette journée, L’Or des îles a souhaité donner la parole aux acteurs de la culture créole. De nombreux artistes, écrivains et réalisateurs ont été sollicités pour répondre à notre Interview Dé mó, kat pawol, spéciale « le Créole et vous ».

Pour ce troisième rendez-vous, l’artiste soul guadeloupéen Freepon, a lui aussi accepté de répondre à nos questions.

Freepon, 

Où avez-vous appris le créole, et qui vous l’appris ?
Aux Antilles. Un peu partout là-bas. Dans ma famille, chez mes grands-parents ou dans les rues des quartiers où j’ai pu résider. A l’école, ou encore à la télé, à la radio.
Je me souviens ne pas avoir été autorisé à répondre à mes parents en créole avant l’âge de 13 ou 14 ans.
Ce ne fut d’ailleurs autoriser qu’avec ma mère, je n’ai jamais senti le bon moment avec mon père…

Que représente pour vous le créole en tant que langue vivante ?
Pour moi, c’est un véritable outil.
En tant qu’artiste, car c’est mon premier matériau, ce par quoi je m’exprime artistiquement. Je reconnais même aimer l’anglais pour sa proximité avec le créole.
En tant qu’être humain, c’est mon ancrage, le noyau de mon expression.
J’entends par là que, étant historiquement/officiellement francophone, le créole restera toujours la langue des émotions les plus vives,
les plus puissantes.
C’est la langue que mes parents utilisaient pour être sûrs de se faire obéir…
C’est une langue « nuancée », aussi brutale qu’imagée, directe dans le « parler » et profonde dans sa poésie.

Aujourd’hui, comment voyez-vous la transmission du créole ?
Oui, je suis favorable à l’enseignement de la langue, mais aussi de l’histoire. Je suis conscient qu’une langue n’est pas que parlée..
Elle témoigne d’une démarche, d’une culture, d’une histoire.
Au travers de l’enseignement, les caractères sous-jacents sont partagés, et c’est là pour moi le plus grand intérêt.
J’aime bien comprendre…#OlaSaSoti
Les arts, et notamment la littérature et la musique. Ce sont de puissants véhicules, à condition d’en prendre conscience.
Leur accessibilité et l’intérêt qui leurs sont portés sont sans concurrence, surtout auprès des jeunes.

Pour vous, pourquoi doit on protéger et promouvoir le créole ?
Pour moi, une langue, c’est une culture, c’est une digestion cohérente du volume des réalités disparates d’une culture.
C’est une culture qui s’exprime. Ainsi, tant que la culture existe, la langue sera son expression.
Je dirai plus qu’il faut faciliter sa diffusion en tant qu’expression du patrimoine culturel.
Afin qu’elle offre les repères naturels à son public, créolophone.

Pour vous que représente le mot créole ?
Au début, le mot représentatif de ma culture. J’entends par là, le mot qui englobe toutes les valeurs
et les traditions propres à mon île, la Guadeloupe, et par extension, les départements créolophones français.
Je pensais que ce mot voulais dire « fourre-tout » ou « medley » car il y a de tout aux Antilles, du plus clair au plus foncé, en passant
par toute sorte de métissage avec l’Asie ou l’Amérique du Sud. Je trouvais ça sympa.
Une grande part de la fierté que je peux ressentir pour mon île vient de cet état de fait.
Aujourd’hui, ayant sû la signification du mot créole ( Qui concerne des personnes de race blanche nées dans les anciennes colonies -les Antilles, la Réunion, la Guyane…), j’aurai un peu de mal à me percevoir comme tel. lol.
Pas d’offense, juste un constat sur mon manque d’intérêt pour mes propres origines ou sur la simple appellation de celles-ci.
Je comprends cependant que, dans les mœurs, toute personne née dans les anciennes colonies naisse « créole », sans distinction de couleur de peau.
C’est d’ailleurs ce qui selon moi participe à la cohésion d’une communauté riche de diversité ethnique.
Et
C’est aussi ma langue, ma cuisine/gastronomie ( c’est sacré! ), mon histoire ( j’entends celle propre aux natifs des anciennes colonies, Antilles, Afrique, France, Inde,…).

Musicalement, pensez vous que le créole puisse s’intégrer sur des partitions plus « conventionnelles » (rock, blues, techno..) ?
Les artistes et créateurs fonctionnent avec des influences qui ressortent tot ou tard.
Il n’y a pas d’obligation à cela. L’art va où il veut, où il doit, selon moi.
Je crois même que tous les genres musicaux défendus aujourd’hui sont « métisses », le zouk ayant puisé dans la Funk ses guitares, ou la « Nouvelle Scène Créole » chantant ses origines sur des musiques aux accents urbains.

Pensez vous que les créolophones peuvent être une force représentative en métropole ?
Ils le sont déjà. Les antillais sont ouverts, hospitaliers, ils se mélangent et apprennent vite.
Nous sommes assurément une force. La limite, selon moi, est dans la perception de cet état de fait.
S’il s’agit d’une représentativité visant à nous « assimiler » totalement dans le modèle idéal national,ce sera difficile. Mais s’il s’agit juste de reconnaître que nous participons à la diversité naturelle de notre environnement, comme chaque « communauté », ce sera plus aisé.

Pour conclure cette interview, je vous laisse le mot de la fin … en créole.
Sé on bèl chans nou ni dè pé désidé dè sa nou yé, dè maké paj a kilti an nou, dè désinèy. An nou !
Sé chak yon adan nou ka défini kréyol la, pou’y, pou pitit ay, é pou chak yon adan nou. Aléw !
Fos aw sé tan mwen ! Si ou bèl an bèl osi