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Le 28 octobre 2016 se déroulera La Journée Internationale de la Langue et de la Culture Créole. Pour célébrer cette journée, L’Or des îles a souhaité donner la parole aux acteurs de la culture créole. De nombreux artistes, écrivains et réalisateurs ont été sollicités pour répondre à notre Interview Dé mó, kat pawol, spéciale « le Créole et vous ».

Pour ce premier rendez-vous, Dominique Lancastre fondateur de Pluton-Magazine et écrivain guadeloupéen a accepté de répondre à nos questions.

Dominique,

Où avez-vous appris le créole, et qui vous l’a appris ?
Personne ne m’a appris le créole. Je suis né en Guadeloupe et à la maison on a toujours parlé les deux langues. Presque tous les antillais sont bilingues. Je ne regrette qu’une chose c’est de ne pas pouvoir l’écrire correctement. Je parle très bien le créole et je comprends le créole Haïtien, le créole Martiniquais et même le créole Guyanais par exemple.

Que représente pour vous le créole en tant que langue vivante ?
Quand on pose les pieds à la Martinique ou en Guadeloupe, on entend dans les rues le créole. A la différence, on n’entend pas le Latin (langue morte) à Rome quand on y est.  On peut donc dire que le créole est une langue vivante sans aucune hésitation.

Le créole est la langue du commerçant. Il est présent dans la vie quotidienne. C’est aussi la langue des revendications et des politiques surtout quand il faut faire passer des messages.  Mais, c’est aussi la langue du poète qui joue avec les sonorités et les nuances de la langue.

Aujourd’hui, comment voyez-vous la transmission du créole et doit-on le protéger et le promouvoir ?
Il n’y a pour moi qu’une transmission possible, celle universitaire. Il est impératif de développer l’enseignement du créole dès l’école primaire. C’est déjà fait mais il faut insister là-dessus. J’ai eu l’occasion de visiter des écoles primaires où les élèves maniaient bien la langue créole à l’écrit comme à l’oral sans l’utiliser comme décoration en complément du français. Cette décoration, on la retrouve surtout chez les personnes qui ne maîtrisent pas trop la langue écrite. J’avais tendance à la pratiquer moi-même. Je pense que c’est une erreur. Il suffit de prendre le temps de bien écrire plutôt que de procéder à un méli-mélo.  Il faut continuer à développer l’enseignement du créole. Mais, pour cela il faut des textes. Il n’y a pas beaucoup d’écrivains qui écrivent directement dans la langue. On peut traduire des textes en créole.

Il est évident que l’on doit protéger la langue en respectant le travail des spécialistes du créole. Il faut éviter l’usage d’une langue phonétique. Certains écrivains n’hésitent pas à traduire des œuvres étrangères en créole. Ce travail de traduction est important car on fait vivre le créole dans un environnement différent et à travers des histoires qui ne sont pas rattachées à la culture créole.

Pour vous que représente le mot créole ?
Je ne me suis jamais posé cette question car il ne faut pas toujours se poser des questions. Le Créole en tant que langue ou bien le Créole en tant que nation créole ? La notion créole est vague. C’est comme dire vous êtes noir mais quel genre de noir.

Pensez-vous que les créolophones peuvent être une force représentative en métropole ?
Je pourrais vous retourner la question. Sont-ils une force représentative dans leurs îles ? Je pense qu’avant de vouloir imposer ses forces ailleurs, il faut commencer à faire le ménage chez soi. Il n’y a pas vraiment de politique engagée pour la défense de la langue sauf quelques auteurs très connus qui défendent la langue par tous les moyens. Il ne faut pas toujours considérer la Métropole comme la seule solution à nos problèmes. On pourrait bien créer un département créole dans une université japonaise par exemple. Pourquoi toujours la métropole ?

  • Dominique Lancastre est l’auteur de :« La Véranda », « Retour à la Grivelière » deux chroniques sociales et du roman « Une femme chambardée »